jeudi 4 février 2010

Fête à la limite


Les cols andins marient fantastiquement minéral argentin, escarpements de la cordillère et verdoyance chilienne (ou inversement). En chemin pour le paso Pehuenche, nous apprenons d'artisans que la cinquantième fête annuelle du « partage » se tiendra sur la frontière, entre les 105 km séparant les douanes.

Vendredi.
Quelques centaines de véhicules au col, arborant des drapeaux, sur un long versant peu incliné, applani et séparé en zones pour la vente, le camping et les officiels, dont les présidentes annoncées en hélicoptère. Installations en cours : poste de secours, éclairage public, toilettes, citerne d'eau, podium, grandes tentes. Groupes de « hermanos (frères) » des deux bords, conversant gaiement un verre à la main de leurs avantages respectifs : viande tendre, légumes, fruits de mer, liberté, santé publique... Symbole fort entre anciennes nations ennemies, seule la frontière du Fitz Roy apparaissant encore grisée sur les cartes.
Arrivées permanentes, noyant bientôt notre stationnement à l'écart. Chacun tend une bâche, plante une tente, déplie matelas et table, creuse à la pelle un foyer pour l'asado, fait retentir sa propre musique. Chevaux, motos et quads affrontant les pentes, coulées de neige, ruisseaux, poussière, vent, ciel bleu de l'altitude, marchands, fumées, police montée, brouhaha, allégresse, danses, ronfleurs noyés d'alccol, jusque (si) tard dans la nuit.

Samedi.
Dès l'aube (si tôt), voitures, bus, camions continuent d'affluer, s'agglutinant en un méli-mélo inextricable. Dix mille personnes rassemblées joyeusement. Nous errons de campement en campement, seuls Français de la fête, reconnaissables (entre autres) aux cheveux clairs de notre « Barbie », sympathisons avec deux couples d'amis chiliens, animés d'humour, dégustons avec eux pisco (liqueur nationale) et chivito (chevreau) argentin.
Spectacles folkloriques. Gros plan de Bruno pour le journal télévisé chilien (est-ce pour cela qu'on nous hèle dans la rue ?). Campement en aval à l'à-pic du lago Maule pour éviter (avec une malice non récompensée) la cohue du lendemain. 

Dimanche.
Deux degrés. Averses, neige, grêle, brouillard. Une file ininterrompue de véhicules fuit les cérémonies annulées. Trois heures au pas pour franchir le contrôle sanitaire, toute la nourriture jetée, alors que 100% des légumes provenait probablement du Chili.
Plus bas, sur la route de Talca, soleil et baignade. Découverte fortuite d'une estancia plus belle qu'un paradis.

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