mercredi 27 janvier 2010

Spectacle des roches

La ruta 40 marque son kilomètre 0 à Rio Gallegos, au nord de la Terre de Feu, et longe la face est des Andes jusqu'en Bolivie, puis jusqu'à l'extrêmité septentrionale du continent, sous d'autres appellations, avec un seul chainon manquant entre Colombie et Panama. Notons, avec un tendre frisson d'émotion, que nous l'avions parcourue sous son numéro 101 en Californie lors de l'escale de notre voyage de noce en Polynésie...
Nos destins se marient de nouveau (deux enfants plus tard). Récemment, presque à sa naissance, entre Cerro Castillo et Bajas Caracoles, au cœur de la rocaille. A présent entre Las Lajas et son kilomètre 3 000, à la latitude de Buenos Aires, parmi une féerie de roches.
Admirable spectacle au fil des jours. Entière gamme des couleurs, des teintes, des nuances : noir d'épouvante, blanc, orange, rouge, rose, mauve, gris, or, vert, bleu. Profusion des silhouettes : monts, aiguilles, dents, tours, magmats de pierriers, laves hérissées, plateaux soulevés et rompus par les séismes, canyons, grottes, dunes, champs de fossiles, imprenables navires érodés, parois végétales, sentinelles, versants fractals, coulées ciselées, flancs plissés et vrillés comme de la crème. Aridité et odeur putride des carcasses d'animaux, puis oasis et plaines alluvionnaires chatoyantes. Névés.

Brûlure du soleil le jour, fraîches risées nocturnes, rhumes. Ombre des bougardes tous les 50 km, dérisoires estancias perdues. Moindres rencontres de voyageurs, retrouvailles des vadrouille en combi. Chaussée variant entre asphalte immaculée, médiocre ripio (piste damée) et infernales saillies de pierres. Inauguration de la roue de secours, après plusieurs milliers de kilomètres de tout-terrain (d'autres attelages comptent les crevaisons en dizaine).
Piscine à Chos Malal, spéléologie dans la Cueva de las Brujas (la grotte aux sorcières), station de ski de Las Leñas, délicieux chevreau et truites au Quincho de Maria à Malargüe, siestes aux heures chaudes lors de la découverte fortuite d'arbres et d'eau. Promenades dans l'infinie solitude, premier 3 000 m pour nos apprentis aventuriers. Perruches, lézards, chinchillas, troupeaux de chèvres, oies, chiens de berger, galop des chevaux. Nuages utopiques. Levées brusques du Zonda, le vent fou de la montagne.

Valle Hermoso. Cirque fantastique, lacs bleutés, écrin engendrant le rio Grande, qui se muera avec le rio Barrancas en rio Colorado, frontière de la Patagonie. Inclinaison une fois encore notre itinéraire vers le Chili, avant d'affronter les hauts cols du nord. Mais pour la poursuite de notre chemin esseulé, le verdict des locaux (charmants au demeurant) s'abbat : « esta cerrado (il est coupé) ». Demi-tour, une centaine de kilomètres au sud, pour tenter d'empreinter le paso Pehuenche.
Avec le sourire. Tout est si beau !

1 commentaire:

  1. Vous n'avez pas honte de faire marcher Romain pied-nu dans la neige? La DASS ne doit pas exister en Amérique du Sud....Bisous

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