Etendues étourdissantes, invraisemblables d'immensité. Panoramas mués au fil des jours. Des demi-journées nuageuses, tempérant la chaleur désertique. Rentrée des classes (indigène).
Vallée de la lune. Pistes coupées par des orages. Après plusieurs heures, la sécheresse à nouveau. Fossiles du triassique et élégant spectacle de la terre. Séisme nocturne. Près de l'épicentre chilien, nous souriions récemment d'un garcon fuyant à skate-board une vague immense, sur les signalisations d'évacuation.
Ruta 40, soudain telle un sentier de montagne escarpé, roches rouges, torrents ocre. Chilecito. Chevreau « à la Torrontes », le vin de la région, à La Posta, avec les attentions du señor Carlos. Ancien téléphérique s'élevant jusqu'à une mine à 4 400 m d'altitude. Faces inquiétantes.
Site Inca d'El Shinkal, antiques escaliers, au cœur d'un cirque pictural. Empilement des paysages : sierras arides, îlot fertile verdoyant, piste grise sur la crête, tortueux rio à sec, versants carmins et bruns déchiquetés par l'érosion, montagnes vert sombre, éclairs, glaciers embrumés. Chevaux au crépuscule se roulant dans la poussière.
Col El Infiernelo (le petit enfer) dans le brouillard, séparant la vallée de San Miguel de Tucuman du plateau désertique des valles Calchaquíes. Neige des sierras Alconquija. Lamas, ruisseau clair et non glacé.
Amaicha del Valle. Musée Pachamama de l'artiste Hector Cruz, à la beauté minérale soignée. Site Inca de Quilmes, lieu saint des Diagatas, admirable, terrassé d'épais murs de pierres, parsemé de cactus, depuis cinq siècles défunt, soufflé par les « Guns, Germs, and Steel: The Fates of Human Societies (de l'inégalité parmi les sociétés) » de Jared Diamond.
Comment imaginer recouvrer la routine de nos existences après de pareilles exaltation ? Déroulé d'une trajectoire dont on ne voudrait banir le mot fin.
samedi 27 février 2010
mercredi 24 février 2010
Boucle sans épines
Cinq mois et demie de voyage, 18 000 km. Dans la Vallée Fertile, nous nous approchons à 300 km de La Cumbre, notre point de départ. Comble de félicité, l'heure n'est pas venue de boucler, mais d'aller à la rencontre des cactus...
samedi 20 février 2010
Déceptions de passage
Abandon des brumes matinales du Pacifique pour les Andes argentines. Lacets et tunel du col du Christ Rédempteur. Neiges du mont Aconcagua, sommet des Amériques, culminant à 6 959 m. Douane inextriquable. Vestiges du prodigieux train « transandino ». Puente del Inca, pont de roche naturel ocré par les eaux thermales.
Ruta 7, s'enfuyant vers Buenos Aires, mille kilomètres plus à l'est.
Mendoza, immense cité arborée, au cœur des vignobles. Plusieurs heures pour atteindre le revendeur Michelin vers lequel nous nous acheminions patiemment depuis un mois, qui malheureusement détient une jante différente (si peu) de la nôtre.
Dégustation d'un vin médiocre à la jolie Bodega la Rural.
Ruta 40 vers le nord. Versants arides, ravinés et tachés d'ombres. L'hiver, la plaine est inondée, la chaussée coupée ou recouverte. Canaux, moustiques, maraîchages, vignes, le plus souvent suspendues.
San Juan, honorable cité arborée. Réception de notre cadeau de Noël : un colis de Californie contenant toutes les pièces imparfaites de notre camping-car, avec un coût d'expédition malheureusement supérieur à leur valeur.
Ordre à la nuit tombée d'un policier municipal de changer de stationnement. Pour sauver la règle : « les Argentins sont (majoritairement) sympas », il fera ensuite son possible pour nous aider.
Recherche interminable d'un réparateur pour une fuite de gaz. Nuits citadines bruyantes, chaleur, fatigue, anxiété.
Difunta Correa. Temple de la superstition. Une femme, morte d'épuisement pendant la guerre civile de 1840, continua d'alaiter son bébé. Prières pour un itinéraire serein.
mercredi 17 février 2010
Repaire du Pacifique
Comment évoquer Valparaiso, qui, à l'instar de cités telles que Fez, Venise, Baratpur ou Alep, se plaît à étreindre le promeneur d'un frisson amoureux ? Berceau des romans de pirates du Pacifique, muse de Pablo Neruda, écrin d'humanité dans une baie azur, infinité de demeures suspendues aux collines, antiques funiculaires, barraques rafistolées, palais en fleurs, labyrinthe ascencionnel, clichés propices à s'étourdir, port, fougue de l'art, vie, lumière. A savourer.
Mille fois prévenus en cours de route, nous avons contourné la délinquance de Santiago et nous garons à « Valpo » entre les quartiers Alegre et Conception, les moins tourmentés. Pourtant, pendant que nous dînons, un jeune-homme tente d'entrer par effraction, s'enfuit à nos cris. Emménagement nocturne dans une station service de l'autoroute (moins glamour).
Quinze millions de pesos. Le prix de notre camping-car ou d'un cheval de race. Enviable pour celui qui trimbale la nuit sur une rocade d'autoroute un sac de marchandises sur ses épaules. Mais en dehors des grandes villes, nous avons peu rencontré de misère au Chili.
vendredi 12 février 2010
Rodeos
A la sortie de Lolol, question impromptue devant sa medialuna (arène) : y-a-t-il un rodeo ce week-end ? Oui ! Rubén propose spontanément de nous héberger dans son terrain voisin. Ecoute à l'ombre de la musique pop américaine des années 70, intenses conversations (qui de notre espagnol ou de notre gestuelle s'affine ?).
Ouverture de la compétition le samedi matin. Gradins de bois, arbitre, orchestre traditionnel chantant des cuecas. Parade des huasos, les magnifiques cavaliers chiliens, chics de l'éperon au chapeau, antithèse des gauchos argentins. Il s'agit pour deux compagnons montés de guider une vache, un à l'arrière et un perpendiculaire sur le côté. Les points s'acquièrent selon la position avec laquelle le buste du cheval contraint chaque demi-tour. Difficile de se passionner de prime abord.
Déménagement pour éviter le sonore bal nocturne. Près de Santa Cruz, sur un chemin de terre, invitation à stationner dans le jardin de la grande et adorable famille de Matias. Pourquoi ? Pour nous prémunir des chauffards ivres, parce qu'un autre rodeo se dèroule tout près. Avec à la nuit tombée, précédent le sonore bal nocturne, sa version mexicaine, mieux connue (et appréciée) des étrangers, dans laquelle sont domptés (ou non) des chevaux sauvages. Bruno termine le spectacle à califourchon sur la palissade séparant l'arène en demi-lunes. Sensations authentiques !
Forte chaleur, journée d'échanges, asado. Vignobles, magnifiques demeures coloniales, collines et panorama des Andes. Sompteux musée du riche vendeur d'armes Cardoen, collections d'une profusion et d'une beauté troublant de l'âme, joyaux pré-colombiens, ambres, têtes réduites.
Le lendemain, une vieille femme toque à notre porte pour nous offrir des fruits, un peintre dont la grand-mère était française nous gratifie d'une œuvre, un vacancier, Edgardo, nous propose de profiter de sa sallle de bains. Doutions-nous de l'extraordinaire hospitalité chilienne ?
Ouverture de la compétition le samedi matin. Gradins de bois, arbitre, orchestre traditionnel chantant des cuecas. Parade des huasos, les magnifiques cavaliers chiliens, chics de l'éperon au chapeau, antithèse des gauchos argentins. Il s'agit pour deux compagnons montés de guider une vache, un à l'arrière et un perpendiculaire sur le côté. Les points s'acquièrent selon la position avec laquelle le buste du cheval contraint chaque demi-tour. Difficile de se passionner de prime abord.
Déménagement pour éviter le sonore bal nocturne. Près de Santa Cruz, sur un chemin de terre, invitation à stationner dans le jardin de la grande et adorable famille de Matias. Pourquoi ? Pour nous prémunir des chauffards ivres, parce qu'un autre rodeo se dèroule tout près. Avec à la nuit tombée, précédent le sonore bal nocturne, sa version mexicaine, mieux connue (et appréciée) des étrangers, dans laquelle sont domptés (ou non) des chevaux sauvages. Bruno termine le spectacle à califourchon sur la palissade séparant l'arène en demi-lunes. Sensations authentiques !
Forte chaleur, journée d'échanges, asado. Vignobles, magnifiques demeures coloniales, collines et panorama des Andes. Sompteux musée du riche vendeur d'armes Cardoen, collections d'une profusion et d'une beauté troublant de l'âme, joyaux pré-colombiens, ambres, têtes réduites.
Le lendemain, une vieille femme toque à notre porte pour nous offrir des fruits, un peintre dont la grand-mère était française nous gratifie d'une œuvre, un vacancier, Edgardo, nous propose de profiter de sa sallle de bains. Doutions-nous de l'extraordinaire hospitalité chilienne ?
mardi 9 février 2010
Plages noires
Remontée du littoral Pacifique, de Curanipe à Bucayemu, au long d'anses de sable noir, dont la célèbre « plus belle plage de rochers noirs du monde » de Constitución (en effet, les rochers sont noirs, teintés de clair par les colonnies d'oiseaux). Alternance de joyaux sauvages et de copieux amas de populace. Régal de poissons et fruits de mer inconnus : merlusa, reineta, macha (impossibles donc à traduire). Hectares de fraises, barques des pêcheurs se dressant haut contre la houle, cygnes à col noir de la laguna Torca, collecte du sel dans la tourbe des estuaires, dômes des fours de confection de charbon de bois, méduses, longues laminaires séchées et cuisinées, écume.
Bilan de notre cinquième mois de voyage, de 2 700 km :
Bilan de notre cinquième mois de voyage, de 2 700 km :
- A améliorer : craindre les villes embouteillées, mettre un pull à Romain lorsque nous aérons le véhicule surchauffé.
- Les points faibles : Marine mange ses yaourts toute seule.
- Les points forts : prédominance du beau temps et baignades, rencontres, variété des décors et de la gastronomie, persévérance et espoir pour notre jante, délicieux moments : plages du Pacifique, routes des sept lacs, thermes de Panqui, lac Villarica, ruta 40, Valle Hermoso, paso Pehuenche, Marine mange ses yaourts toute seule.
jeudi 4 février 2010
Fête à la limite
Les cols andins marient fantastiquement minéral argentin, escarpements de la cordillère et verdoyance chilienne (ou inversement). En chemin pour le paso Pehuenche, nous apprenons d'artisans que la cinquantième fête annuelle du « partage » se tiendra sur la frontière, entre les 105 km séparant les douanes.
Vendredi.
Quelques centaines de véhicules au col, arborant des drapeaux, sur un long versant peu incliné, applani et séparé en zones pour la vente, le camping et les officiels, dont les présidentes annoncées en hélicoptère. Installations en cours : poste de secours, éclairage public, toilettes, citerne d'eau, podium, grandes tentes. Groupes de « hermanos (frères) » des deux bords, conversant gaiement un verre à la main de leurs avantages respectifs : viande tendre, légumes, fruits de mer, liberté, santé publique... Symbole fort entre anciennes nations ennemies, seule la frontière du Fitz Roy apparaissant encore grisée sur les cartes.
Arrivées permanentes, noyant bientôt notre stationnement à l'écart. Chacun tend une bâche, plante une tente, déplie matelas et table, creuse à la pelle un foyer pour l'asado, fait retentir sa propre musique. Chevaux, motos et quads affrontant les pentes, coulées de neige, ruisseaux, poussière, vent, ciel bleu de l'altitude, marchands, fumées, police montée, brouhaha, allégresse, danses, ronfleurs noyés d'alccol, jusque (si) tard dans la nuit.
Samedi.
Dès l'aube (si tôt), voitures, bus, camions continuent d'affluer, s'agglutinant en un méli-mélo inextricable. Dix mille personnes rassemblées joyeusement. Nous errons de campement en campement, seuls Français de la fête, reconnaissables (entre autres) aux cheveux clairs de notre « Barbie », sympathisons avec deux couples d'amis chiliens, animés d'humour, dégustons avec eux pisco (liqueur nationale) et chivito (chevreau) argentin.
Spectacles folkloriques. Gros plan de Bruno pour le journal télévisé chilien (est-ce pour cela qu'on nous hèle dans la rue ?). Campement en aval à l'à-pic du lago Maule pour éviter (avec une malice non récompensée) la cohue du lendemain.
Dimanche.
Deux degrés. Averses, neige, grêle, brouillard. Une file ininterrompue de véhicules fuit les cérémonies annulées. Trois heures au pas pour franchir le contrôle sanitaire, toute la nourriture jetée, alors que 100% des légumes provenait probablement du Chili.
Plus bas, sur la route de Talca, soleil et baignade. Découverte fortuite d'une estancia plus belle qu'un paradis.
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