mardi 1 décembre 2009

Au cœur de l'estancia


La señora Rolito est une grand-mère altière. Son grand-père, dentiste à Buenos Aires, aventurier, acheta en 1926 dix-mille hectares en Terre de feu, lors de sa parcellisation par l'Etat pour mettre fin à des conflits de partage, avec consigne d'y faire croitre clôtures, ovins et dueños (propriétaires).
Une estancia naissait.

La señora Rolito vit entourée de sa famille. Ses enfants sont diplômés d'écoles de Buenos Aires, son mari y exerce partiellement son métier de chirurgien. Ils élèvent aujourd'hui, sur dix-sept mille hectares, quatre mille moutons. L'estancia en accueillait le double, mais des chiens errants venus de la ville attaquent les troupeaux. Des vaches les remplacent, moins dociles.
La fièvre afteuse et la mouche du fruit, combattues en Patagonie, épargnent heureusement l'île. L'attention se porte sur le déplacement des troupeaux sur les parcelles, avares en nourriture, gelées et partiellement recouvertes de neige en hiver.
  
A flanc d'une colline, des maisons de bois hébergent famille, invités, contremaitre, ouvriers, chiens de berger, chevaux, matériels, véhicules, hangar de tonte. Un berger loge six mois par an dans un poste reculé. Une équipe de tondeurs se loue d'une estancia à l'autre.
Feu et braises, gaz pour l'eau des baignoires, générateur au diesel pour l'éclairage et le raccord par antenne radio au réseau téléphonique à Tolhuin. Réfrigérateur inutile.

La famille de la señora Rolito est charmante. D'une voix douce, elle accueille des hôtes pour repas et nuitée, commente la visite de ses terres et, parce qu'un ancêtre venait de Pau, parle le français.
Ainsi se transmet une histoire.

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